ET LISEZ RECLUS 7 PARCOURS SCHUITENIEN
Dernière la carapace du masque, des lunettes de soleil et des gants vinyle, cheminant dans la ville désertée, resplendissante et pourtant obscure, résonne en moi les vibrations de Lux Aeterna de LIGETI.
J’éprouve une sorte de sentiment étrange, en terrain faussement connu, sorte de « Souvenirs de l’éternel présent » comme dans cette étrange chambre « Louis XVI » où Bowman vit et meurt en temps accéléré à la fin de 2001, L’Odyssée de l’espace de KUBRICK.
Depuis quelques jours, je recherche fébrilement sur le net une BD qu’on m’avait prêtée au tout début des années 80 et dont les images me hantent. Et je l’ai retrouvée ! C’est Carapaces de Luc et François SCHUITEN.
Luc et François ? « SCHUITEN » seraient-ils deux ? Exactement ! Luc, né en 1944 et son frère François, né en 1956, ont d’abord collaboré à imaginer les planètes fantastiques des trois albums des Terres Creuses dont Carapaces est le premier volet.
Je me souviens avec une très grande précision de l’endroit où j’ai lu Carapaces, avec cette quasi certitude qu’il viendrait un jour où nous devrions vivre au quotidien avec des carapaces protectrices. Nous y sommes (presque).
Ligeti : Lux Aeterna (Choeur de Radio France)
Le Choeur de Radio France dirigé par Zoltan Pad interprète Lux Aeterna de György Ligeti. Extrait du concert donné le 16 mars 2019 en direct de l'Auditorium de la Maison de la Radio.Lux Aeterna ...
durée 9 minutes
Ensuite, Luc SCHUITEN a poursuivi sa carrière d'architecte "biomimétique" de l’après-demain : « Un architecte ne dessine jamais que le futur, il dessine des bâtiments qui n’existent pas aujourd’hui, qui existeront peut-être demain. C’est ce que je fais, mais au lieu que ce soit demain, c’est après-demain, un peu plus loin, dans cent ans ou plus tard encore. Je pose des hypothèses, celles qui sont désirables en tout cas pour moi : le monde dans lequel j’aimerais bien vivre, qui s’est réconcilié avec la planète, qui a commencé à bâtir des choses en bonne intelligence. »
Tandis que François SCHUITEN , associé à Benoît PEETERS, a inventé sur un quart de siècle les mondes des onze (douze ?) albums des Cités Obscures. Visionnaires tous les deux, tous les trois.
Les Cités obscures (bande annonce)
Née en 1982 de la collaboration de François Schuiten et Benoît Peeters, la série Les Cités obscures est aujourd'hui une œuvre culte, avec 1,2 million d'exemp...
Rue Jeannin, une fine poussière d’immobilité s’est déposée sur des véhicules devenus bienheureusement inutiles.
Au n°8 le directeur des archives départementales met en ligne quotidiennement les fonds d’archives oubliées, de "coronarchives" en "sérendipités" et contribue à perturber la chronologie : au détour de la rue Lamonnoye déserte, un passant au chapeau melon, comme sur une photo de Martial CAILLEBOTTE.
Passant rue Lamonnoye, document Archives départementales de la Côte-d'Or (ADCO).
Archives départementales de la Côte-d'Or
Sérendipité 47 : verbalisés pour détention d'eau salée (1729) L'après-midi du 18 novembre 1729, Collin et son gendre Monin, demeurant ensemble laboureurs au village de Sansange, paroisse de ...
Parcours de la ville et parcours du temps. Suis-je en uchronie ou en dystopie ?
Imprimerie Lépagnez, document ADCO
« Aux zones en ruines succédaient quelques îlots plus préservés qui semblaient n'avoir été désertés que depuis peu. Parfois même, nous découvrions de curieuses machines dont je ne parvenais pas à comprendre l'usage. » Les Cités obscures, Tome 3 : La tour
François SCHUITEN et Benoît PEETERS, Souvenirs de l'éternel présent, Éditions Casterman.
A part quelques liseurs sur des balcons, les habitants avaient-ils massivement quitté la ville ? Où étaient-ils ? D'où venait cette impression de décalage ? Etait-ce une illusion ? "Je commençais à ressembler aux autres habitants de Samaris, promeneur à demi léthargique parcourant chaque jour les mêmes ruelles."
François SCHUITEN et Benoît PEETERS, Les Murailles de Samaris, Éditions Casterman.
« La question que maintenant je me pose est de savoir si un point du parcours du temps peut se superposer à des points de précédents parcours. En ce cas, l’impression d’épaisseur des images s’expliquerait par le battement répété du temps sur un identique instant. Il pourrait toutefois se produire, en certains points, un petit décalage d’un parcours à l’autre : les images légèrement redoublées ou effacées seraient alors l’indice que le tracé du temps est un peu usé par l’usage et laisse une étroite marge qui joue sur les bords de ses passages obligés. Mais même s’il ne s’agit que d’un effet optique momentané, il reste l’accent comme d’une cadence dont il me semble que je la sens battre sur l’instant que je vis. Je ne voudrais toutefois pas que tout ce que j’ai dit fasse apparaître cet instant comme doué d’une consistance intemporelle spéciale dans la série d’instants qui le précèdent et le suivent : du point de vue du temps c’est proprement un instant qui dure aussi longtemps que les autres, indifférent à son contenu, suspendu dans sa course entre le passé et le futur ; ce que je crois avoir découvert, c’est seulement son retour ponctuel selon une série qui se répète identique à elle-même à chaque fois. »
Italo Calvino, Temps zéro, traduit de l’italien par Jean Thibaudeau, Éditions du Seuil, 1970.
Luc Schuiten, un architecte visionnaire
Exposition Dates de l'événement 07 janvier 2020 au 30 avril 2020 Corps " Pour les gens qui veulent bâtir un modèle de société en croissance infinie sur une planète déjà surexploitée, le m...
http://www.latitude21.fr/expositions/luc-schuiten-architecte-visionnaire
Pourtant, tout avait bien commencé dans la bulle du 9 janvier 2020 au vernissage de l’exposition Luc SCHUITEN à Latitude 21, alors que le même jour, sous une autre latitude, les autorités sanitaires chinoises –et l’OMS- déclaraient l’existence d’un nouveau coronavirus qui sévissait depuis un mois et que nous feignions d’ignorer.
Coronavirus : les grandes dates de la pandémie
L'Organisation mondiale de la santé a annoncé début janvier qu'un nouveau coronavirus pouvait être à l'origine d'une épidémie inconnue, apparue en Chine le 8 décembre. Depuis cette date, le...
https://www.la-croix.com/Monde/Coronavirus-grandes-dates-pandemie-2020-04-25-1201091132
Nous étions très nombreux à ce vernissage et nous n’étions pas venus pour le buffet ! Nous nous pressions dans une promiscuité rêveuse devant les aquarelles et dessins de Luc SCHUITEN, ses maisons bioclimatiques, ses « habitarbres », ses villes végétales éclairées en bioluminescence, ses habitations en osmose complètes avec le lieu de leur implantation.
Ci-dessus une photo prise pendant l'expo, mais la plupart des reproductions sont protégées. Vous pouvez consulter un album sur le site ci-dessous :
Les fabuleuses cités végétales de Luc Schuiten (1) - Hortus Focus I mag
Architecte et dessinateur, Luc Schuiten mène depuis près de 40 ans, une réflexion croisant l'urbanisme, l'écologie, la science et la science-fiction. Il expose son travail à la Saline Royale ...
https://magazine.hortus-focus.fr/blog/2018/09/17/les-fabuleuses-cites-vegetales-de-luc-schuiten-1/
Et Luc SCHUITEN était présent, en grande forme ! Et toujours aussi nombreux, nous l’avons écouté nous « raconter le futur avec les deux pieds sur terre dans la réalité d’aujourd’hui », nous expliquer que « chacun de [ses] dessins est une hypothèse faite pour se poser la question de savoir si nous avons envie d’y aller ou pas. » Nulle doute que nous étions prêts à y aller, et tout de suite !
Luc SCHUITEN, le 9 janvier 2020 à Latitude 21 (Dijon), citant Francis BLANCHE :
"Mieux vaut penser le changement que changer le pansement."
Comme nous étions heureux de l’écouter nous décrire - loin de tout mythe eschatologique et sans prophétie collapsologique- l’obsolescence de notre actuelle manière de vivre, nous expliquant, avec un enthousiasme communicatif, qu’il y a un autre monde à réinventer et que la nature nous offre des modèles qui sont une formidable source d’inspiration.
Contents, mais un peu frustrés dans cette cohue, de ne pas avoir eu plus d’espace et de temps pour parcourir toutes les salles, nous étions nombreux à nous promettre de revenir « au calme » pour regarder cette exposition de plus près.
Et puis, les portes de l’exposition se sont refermées à la mi-mars, écourtant l’exposition qui devait durer jusqu’au 30 avril.
L’exposition sera-t-elle prolongée ? D’autres lieux la réclament sans doute. Mais ce n’est pas le plus important. L’important c’est sur quel avenir ces portes se rouvriront.
Alors que tous les médias et politiques nous entonnent en mode mineur les chansons du " monde d’après" la crise du COVID 19,
c’est à chacun de nous de nous activer pour démontrer qu’ils se trompent et qu’il y a d’autres possibles, pour peu qu’on le veuille.
Pour nos enfants, courage !
« Pour les gens qui veulent bâtir un modèle de société en croissance infinie sur une planète déjà surexploitée, le mot utopie signifie l’illusion d’un rêve impossible à réaliser qui ne s’applique pas à leurs projets. Pour nous qui cherchons à construire un nouveau modèle de société durable, dans une symbiose avec notre environnement naturel, le mot utopie veux dire simplement, un possible qui n’a pas encore été expérimenté. »
Luc SCHUITEN, citation extraite de :
LUC SCHUITEN - Cité Végétale - Luc Schuiten
1944 Janvier : naissance à Bruxelles. 1967 Diplôme d'architecture de l'Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles. 1976 Début des études de l'archiborescence : auto construction de la maison ...
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